La confiance, un choix au service d’une énergie positiveDiriger avec confiance est avant tout un parti pris, un choix.
Ce choix n’est pas naturel compte tenu du fait que la peur, consciente ou non, est un état quasi permanent des personnes dans l’entreprise, où changement et incertitudes sont les règles.
Or la peur conduit à vouloir « maîtriser » pour éviter le risque d’être pris en défaut, déçu, voire trahi.
Alors pourquoi décider de faire confiance ? Parce que donner de la confiance à travers une mission ou un travail accroît l’estime de soi et démultiplie l’énergie positive. En effet, cela montre à l’autre :
– qu’il est important (en lui donnant un rôle et une place)
– qu’il est capable (l’action libère de la peur, et l’encouragement potentialise)
– qu’il est apprécié (on se réjouit qu’il réussisse)
… tous besoins fondamentaux pour chaque être humain.
Répondre positivement à la confiance sincère dont on bénéficie est donc un moyen d’établir un lien humain précieux.
C’est pour cette raison que la probabilité que l’autre soit digne de cette confiance est proche de 98% !
La confiance donnée aide l’autre à réussir. C’est un risque à prendre, mais beaucoup moins destructeur, et tellement plus contagieux et fructueux que la défiance.
Apprentissage mutuel et consciemment vouluToutefois, ce qui précède pourrait être qualifié à juste titre d’angélisme, et ne suffit pas. La confiance ne peut advenir qu’à l’issue d’un apprentissage mutuel et consciemment voulu.
Bien se connaître
Le responsable apprend à bien connaître son collaborateur afin d’identifier ses zones d’excellence, son potentiel, mais également pour tenir compte de ses faiblesses et limites, sans les juger (existe-t-il un collaborateur parfait ?).
De plus, dans une relation managériale (qu’elle soit hiérarchique ou transverse), il est précieux d’identifier les préférences de chacun en matière :
1- d’impact souhaité : Sur quel sujet, de quelle façon et à quel degré le collaborateur veut-il s’impliquer ? Quelle étendue de responsabilité est-il prêt à prendre ? … mais aussi à quel partage le responsable est-il prêt ?…
2- de contrôle reçu : certaines personnes souhaitent un cadre précis tandis que d’autres ont besoin d’une large marge de manœuvre pour s’épanouir … mais la préférence du collaborateur correspond-elle à la manière dont le responsable apprécie de manager ?
En fonction de la compatibilité des préférences respectives, des ajustements consciemment posés peuvent être salutaires.
Nourrir la boucle d’apprentissage mutuel
Le processus est itératif, car la relation se nourrit de l’apprentissage mutuel.
Aussi, l’évaluation de la mission, mais aussi celle de la relation, sont indispensables quel que soit le degré d’autonomie du collaborateur.
Concernant la mission, le devoir du manager est de contrôler son collaborateur (de manière régulière et selon des critères transparents, avec exigence et bienveillance), et celui du collaborateur de rendre compte de sa mission et d’en accepter l’évaluation objective et subjective.
Cette boucle de retour nourrit la connaissance des points forts et zones de progrès du collaborateur, pour que la confiance s’établisse sur des bases solides.
Mais la confiance grandit aussi grâce à l’évaluation de la relation.
Et à cet égard il convient de prendre en compte la montée en autonomie1, qui est un processus vivant, comprenant différentes étapes, avec des besoins différenciés du collaborateur. A l’étape de la dépendance, le collaborateur a généralement besoin d’un accompagnement soutenu et précis. A celle de la contre-dépendance, il confronte, conteste, et élabore ses propres stratégies. L’indépendance est le moment où il est capable de se débrouiller seul (mais son responsable a besoin d’informations pour exercer son rôle), et enfin l’interdépendance celui où chaque apporte sa contribution dans une logique de soutien mutuel. Et le processus repart à chaque nouvel apprentissage !
Prenons quelques exemples : J’ai en tête ce responsable devant gérer sa collaboratrice sur site distant et qui, croyant bien faire, lui téléphonait chaque matin. Au fil du temps, celle-ci au départ très autonome et indépendante dans son travail, avait fini par perdre totalement confiance en elle.
A l’inverse, je repense à mes débuts professionnels. Mon premier responsable lisait mes rapports et y apposait un simple « Vu, OK » sans aucun autre commentaire. Cela ne m’encourageait guère, et ne me permettait pas de progresser !
La relation est donc vivante et non statique, et les besoins de chacun peuvent se télescoper au fil de ce processus, d’où la nécessité de les expliciter régulièrement.
Créer les conditions de la confiance
Confiance inconditionnelle
Ce qui est délicat dans la confiance, c’est de la donner de manière inconditionnelle :
« Je te donne ma confiance pour que tu donnes le meilleur de toi, parce que je connais tes qualités et que je sais que tu feras tout pour réussir » (et non pas parce que « je sais que tu réussiras »).
C’est donc donner des signes de reconnaissance positifs à l’autre (par rapport à qui il est et par rapport à ce qu’il est capable de faire) et également lui donner le droit à l’erreur, source de progrès et nécessaire à tout engagement et toute créativité.
Des relations ajustées, en faveur de la solidarité et de la créativité
Mais parfois au-delà de l’erreur possible, c’est la relation qui est abîmée, suscitant une déception, voire une blessure. J’entends souvent dire : « cette personne n’a pas été digne de ma confiance et je ne pourrai jamais plus la lui redonner ». Mais souvent aussi, l’offense n’est pas dite. Comment une demande de pardon peut-elle être possible ?
Ou bien : « Cela ne pourra jamais être comme avant ». Certes, on n’oublie pas. Mais reconstruire la relation est possible, en réitérant le processus, dans la transparence : « Voici ce que j’attends de toi, ce que je te demande pour réparer et repartir sur de nouvelles bases. Que puis-je faire de mon côté pour t’aider ? ».
Faire confiance, c’est redonner une chance à la relation en surmontant la difficulté, et cela permet souvent de resserrer les liens, d’augmenter la solidarité et donc les résultats !
Enfin, en prenant l’optique : « Chacun est responsable à 100% et nul n’est à blâmer »2, les acteurs admettent leur part de responsabilité respective, se tournent conjointement vers l’avenir pour rechercher une solution.
Je conclurai en disant que la confiance, d’après moi, est un beau chemin d’essai/ajustement vertueux, dans lequel chacun est conscient de ses qualités et de ses fragilités.
Chers lecteurs, cela rejoint-il certaines de vos expériences?
1Modèle de l’autonomie de Katherine Seymour
2Will Schutz, l’Elément Humain